AgroBourse : voir l’agriculture autrement

Dans un environnement hautement concurrentiel et complexe, dans le cadre d’une restructuration optimale et moderne du secteur agricole et afin d’assurer aux différents opérateurs économiques du domaine un accès intelligent, rapide et ciblé aux produits grâce à l’économie d’échelle et à la mise à disposition de nouvelles technologies d’information,  Altiad Tunisie lance un nouveau projet baptisé « AgroBourse », une idée prometteuse et innovante mettant en place le concept du smart-fournisseur / smart-client. Le projet consiste à analyser, centraliser, structurer, et optimiser un marché agricole qui reste dans la majorité des cas éparpillé, entravé et entravant  pour les différents opérateurs rendant ainsi le couple qualité / coût loin d’être optimisé. Yassine Grissa, Directeur associé d’Altiad Tunisie et initiateur du projet, nous renseigne davantage sur les points forts d’AgroBourse et des modalités de sa mise en place.

leconomistemaghrebin.com : Quel est le concept de mise en place d’AgroBourse ? Comment peut-on présenter le projet ?

AgroBourse est une plateforme informatique assimilée à une salle des marchés regroupant tous les intervenants du secteur agricole : Agriculteurs, centrales d’achat,  traders, sales, analystes, transitaires, transporteurs, etc… Les mettant tous en contact direct ou indirect pour un flux d’informations et de produits fluides et optimisés.

Cette très riche plateforme centralisatrice se présente comme un outil de trading sur les produits et les prix, ce qui permettra une rapidité de passage des transactions en achat et en vente (Trading) et une garantie d’un rôle optimisateur des prix des transactions à travers le benchmarking. Aussi et afin de permettre à ses utilisateurs une meilleure couverture du risque financier, AgroBourse donne la possibilité d’associer aux transactions effectuées une panoplie d’instruments financiers dédiés notamment aux contrats (spot et à terme), aux options de change, aux bermudiens et aux assurances pour le hedging des trades.

D’un point de vue technique, le système d’information de la plateforme se base sur des algorithmes de pointe, d’intelligence artificielle et d’optimisation, offrant à l’utilisateur un outil d’aide à la décision d’une plus grande fiabilité.

Quels objectifs visez-vous par la création de cette plateforme ?

Un triple objectif : le premier du côté fournisseur- producteur qui consiste à structurer et rentabiliser le marché agricole pour atteindre le  Fair Trade (le commerce équitable).

Le deuxième du côté consommateur- acheteur dont la plateforme lui permettra d’organiser et de bien planifier et d’optimiser ses achats à travers notamment :

  • La centralisation des intervenants dans une seule plateforme
  • Une vision sur les récoltes prévisionnelles qui conduira à une optimisation des choix
  • La garantie d’un choix optimisé à travers divers instruments et d’outils d’aide à la décision.

Le troisième du côté de l’Etat. AgroBourse disposera également d’un énorme entrepôt de données d’une valeur capitale permettant, entre autres, aux décideurs de l’Etat tunisien de disposer d’une multitude de tableaux de bord décisionnels leur permettant de prendre les meilleures décisions.

L’Etat tunisien pourra se faire une idée sur son autosuffisance alimentaire et travailler d’emblée sur l’excédent de production. Pour cela, AgroBourse s’est dotée d’un référentiel international composé de plus de 70.000 centrales d’achat et sociétés importatrices réparties sur les cinq continents.

D’autres objectifs sont encore à citer, notamment :

  • La réduction des coûts et la mise en place d’une assise fiscale transparente.
  • L’établissement d’une cartographie des productions agricoles et de tableaux de bord des superficies agricoles et l’augmentation des réseaux de distribution.
  • La rencontre agriculteurs/assureurs pour une meilleure gestion de risque récolte/exportation.
  • La normalisation des produits afin de les rendre conformes aux standards internationaux et la mise en place de support juridique permettant de préserver les droits de chaque partie
  • Cette plateforme offrira également un espace de recrutement dans le domaine agricole.
  • A travers AgroBourse, nous pouvons prétendre relancer le grand Maghreb et ce à travers les achats groupés des matériels agricoles, ce qui va permettre à ces Etats de réaliser des économies d’échelle substantielles.

Quels sont les produits commercialisés dans votre plateforme ?

  • Tout d’abord cette plateforme couvrira en premier lieu les besoins de première nécessité et présentant un souci de coût et de non régularité des offres que ce soit pour les fournisseurs, les agriculteurs ou les consommateurs.

Dans l’absolu, la plateforme commercialisera une large gamme constituée de produits conventionnels, Bio et médicinaux. On va, également, commercialiser le matériel agricole, et les produits indispensables aux agriculteurs (engrais, semence, traitement, etc.).

Que peut-on savoir sur l’avancement du projet ?

Le projet a été conçu en deux phases, une première phase de conception qui vient d’être achevée. Cette phase a nécessité la participation d’une large équipe de professionnels ayant une expérience dans le domaine de l’approvisionnement et du Trading de matières premières, une deuxième phase pour  le développement de la plateforme avec la dernière technologie répondant aux exigences de rapidité, d’exécution, de sécurité de données et des utilisateurs. Cette phase a débuté en octobre 2016 dans l’ambition de finaliser une première version en juin 2017. Ce projet a nécessité le déploiement d’une dizaine d’ingénieurs et prévoit une charge totale de 4 000 Jours/Hommes pour la version finale, incluant tous les modules prévus.

Quels sont les marchés concernés par cette plateforme ?

Notre objectif est de conquérir plusieurs marchés à commencer par l’Afrique et nous viserons ensuite le Middle-East et le Canada.

Quels sont les principaux modules de la plateforme « AgroBourse » ?

Notre équipe d’ingénieurs a visé une plateforme modulaire. Autrement dit, elle a commencé par décortiquer toute la chaîne, c’est-à-dire dès  la production jusqu’à la vente, puis elle s’est penchée sur les besoins d’un agriculteur existant ou  un nouvel investisseur qui songe s’investir dans le secteur agricole. Comme cela a été spécifié ci-haut, notre objectif consiste à impliquer le marché parallèle dans le circuit conventionnel de vente dans tout ce qui concerne le secteur agricole, et c’est sur cette base que la conception a été faite :

Module : Vente/Achat & location du terrain agricole

Module : Vente/achat : Engrais/Semences & produits de traitement

Module : Pépinière : Achat/Vente

Module : Vente/Achat & location du matériel Agricole

Module : Référentiel des cabinets d’experts en agriculture afin de doter l’agriculteur du meilleur conseil

Module : Banque, Assurance

Module : Transitaire, Transporteur

Module : Centrales d’achat locales et étrangères. Dans ce module, les agriculteurs auront accès à une base de données relatives aux centrales d’achat worldwide, ce qui va leur permettre de préparer la vente de leur récolte tout en couvrant les risques inhérents aux aléas climatiques et de productions via la mise en place de polices d’assurances.

Module : Emploi : Dans ce module, « AgroBourse », sera le premier site de référence en Tunisie pour les métiers relatifs à l’agriculture. Ce module est d’ores et déjà fonctionnel. Par conséquent, les agriculteurs et demandeurs d’emploi peuvent désormais publier leurs besoins  et leurs demandes d’emploi. Nous visons, à travers ce module, à mettre en place un simulateur qui permettra aux agriculteurs de bien préparer leurs besoins en matière de main-d’œuvre pour leurs futures récoltes et d’éviter les situations où ils seront en manque de personnel. Cette étape suscite des études sur terrain afin de rendre les simulateurs fiables en matière de prévisions.

Enfin, nous tenons à spécifier que notre plateforme est conçue sur la base de nouveaux langages de programmation afin de faire profiter ces agriculteurs de la nouvelle technologie. Pour cela, nous avons utilisé des algorithmes d’intelligence artificielle en vue de fournir des informations fiables, avec une marge d’erreur très faible.

Force est de constater que cet outil ne peut réussir que si seulement l’Etat tunisien ou autres s’implique autant dans la mise en place d’une structure humaine qui pourra rendre ce projet viable.

Quelles sont vos prévisions en matière de création de postes d’emploi ?

Je tiens à rappeler que les meilleurs outils au monde ne servent quasiment à rien s’ils ne sont pas associés à de vraies structures organisationnelles.  Pour que l’agriculture tunisienne ou autre puisse relever les défis, elle devra être dotée d’une équipe professionnelle. Nous avons divisé la Tunisie en six desks ou bureaux, Chaque bureau assurera la couverture de quatre gouvernorats.

La plateforme « AgroBourse » assurera, par conséquent, les cinq mille communes du pays. Nous prévoyons la mise en place de la structure suivante :

  • Un Head office
  • Six desks régionaux

Chaque desk est doté d’une équipe de Traders ou de commerciaux spécialistes dans le trading, et ce, par rapport à un portefeuille de produits. Une fois l’information est mise à jour dans la plateforme d’AgroBourse, le trader commencera les négociations avec les importateurs et centrales d’achat étrangers et établira les contrats y afférents.

Une équipe de « Sales » qui couvrira tous les produits. Le rôle des « Sales » consiste à remonter l’information aux traders par rapport aux futures récoltes.

Nous estimons qu’au minimum, il y aura entre 1000 et 1500 postes d’emploi directs et plus de 2500 indirects.

Quelles sont vos principales recommandations pour la réussite de ce projet ?

Ce projet ou plateforme est, avant tout, un projet d’Etat par excellence. Il implique trois ministères, en l’occurrence  le  Ministère de l’Agriculture qui sera responsable de la cartographie de la production. le Ministère du commerce qui sera le garant des exportations et l’assureur d’un « Fair Trade ». Le Ministère des Affaires étrangères : ce ministère est doté d’un réseau fort en matière de présence dans les cinq continents, ce qui rend le recyclage et la formation des attachés économiques à la plateforme « AgroBourse » indispensables afin de remonter l’information concernant la production tunisienne en matière agroalimentaire. Ces attachés économiques seront les premiers ambassadeurs des produits tunisiens.

Enfin, nous recommandons vivement une structure composée de représentants de ces trois ministères en vue d’assurer un certain niveau d’efficacité.